Tetsave
Un vêtement de lumière
‘’Tu feras confectionner pour Aaron ton frère, des vêtements sacrés, insignes d’honneur et de majesté. Tu enjoindras donc à tous les artistes habiles que J’ai doués du génie de l’art, qu’ils exécutent le costume d’Aaron, afin de le consacrer à mon sacerdoce’’(Ex. XXVIII – 2, 3). La Thora décrit ainsi longuement la confection des vêtements des prêtres et y attache une grande importance.
Maïmonide donne pour motif de la description minutieuse de ces habits sacrés, d’honorer le Temple. A cet effet, un insigne honneur et une magnificence sont accordés aux prêtres revêtus de ces vêtements , beaux et élégants. Aussi, un défaut corporel, infirmité ou difformité, rendait les prêtres impropres au service. Car le commun du peuple n’apprécie la personne, de prime abord, que par son aspect extérieur, la perfection de ses membres et la beauté de vêtements seyants (Guide des Egarés III – 45).
Nahmanide met l’accent sur les qualités de cœur et d’intelligence exigées par la Thora chez les artisans appelés à confectionner les vêtements des prêtres, en toute conscience de leur signification, et de l’intention du service auquel ils devaient être affectés. L’objectif du sanctuaire exige que l’esprit de sainteté soit porté jusqu’au détail pour la réalisation de l’idéal de perfection et de pureté morale qui en est le but suprême.
Les sages du Talmud avancent que les vêtements sacrés possédaient une vertu expiatoire, au même titre que les sacrifices eux-mêmes ; chaque pièce du vêtement représente la mise en garde d’une transgression de la loi, qui pourrait menacer l’individu. Comme l’enseigne le Talmud (traité Aharakhin 16 a), Rabbi Aanani bar Sasson s’interroge à propos de la juxtaposition de la loi des vêtements sacrés et l’offrande des sacrifices ! Et conclut que à l’instar des sacrifices, chacun des vêtements a également pour objet d’expier les péchés.
Le kitonet, la tunique à mailles, évoque l’interdit de toute effusion de sang ; tel qu’il est fait allusion dans le verset :’’ils prirent la tunique de Yossef, immolèrent un chevreau et trempèrent la tunique dans son sang’’(Gen. XXXVII – 31).
La culotte de lin mikhné sayim, fait référence à la défense de toute forme de dépravations sexuelles ; comme il ressort du texte :’’fais-leur des culottes de lin pour couvrir la nudité de la chair…’’(Ex. XXVIII – 42)
La mits nephet, la tiare, suggère le rejet de toute attitude arrogante et orgueilleuse.
Le avnet, l’écharpe, procure le pardon pour les mauvaises pensées du cœur ; selon l’expression du texte ‘’elle sera portée sur le cœur d’Aaron’’.
Le pectoral du jugement , hochen ha michpat, renvoie au verdicts de justice
Le ephod se rapporte à l’interdit du culte idolâtre
Le me’il, la robe de l’ephod, rappelle la défense de toute médisance
Le tsits zahav, la plaque d’or pur, met en garde contre l’insolence et l’impudence.
Ces prestigieux vêtements dont le cohen était paré, influaient sur sa personne pour le rendre meilleur et plus fervent dans l’accomplissement de son sacerdoce. Comme le rapporte l’auteur du Sefer Ha Hinoukh (le livre des 613 commandements) :’’La personnalité de l’homme se crée par ses actes et ceux-ci sont les fruits de sa pensée et de sa volonté. Aussi, celui qui est mandaté par ses frères pour obtenir le pardon de leurs fautes, doit-il mettre toutes ses pensées , toute sa volonté, au service du Très haut. La Thora prescrit donc pour lui des vêtements particuliers, afin qu’à tout moment pendant son service, son regard rencontre ces symboles et qu’il soit conscient de la haute fonction dont il est investi, qu’il se souvienne devant qui il accomplit son sacerdoce…’’.
Certains maîtres insèrent les lois relatives aux vêtements sacrés dans la perspective universelle du sanctuaire, et considèrent que, de même que le tabernacle reflète la structure du monde de la création, le Grand-Prêtre représente l’homme idéal, appelé à réaliser l’union de la créature et du créateur.
Dans le même esprit, les vêtements sacrés ordonnés par le Grand-Prêtre, font pendant aux tuniques de peau que l’Eternel a confectionnées pour Adam et Eve après le péché.
Le Midrach (Berechith raba 20) rapporte que ce vêtement de peau était, selon la version de Rabbi Meïr, comme un vêtement de lumière, une source de clarté et de progrès, si on en fait un usage adéquat. Certes, ces tuniques servaient de protection physique du corps, mais elles offraient en même temps une préservation de l’âme, celle-ci ayant été entachée par le péché auquel elle succomba emportée par la tentation des désirs charnels. Les tuniques rappellent l’état antérieur au péché où l’homme était enveloppé d’une auréole de lumière qui lui conférait une splendeur majestueuse aux yeux de toutes les créatures du ciel et de la terre. C’est à cela que fait allusion le psalmiste lorsqu’il s’écrie : ‘’Tu as fait l’homme presque l’égal des êtres divins, tu l’as couronné de splendeur et de magnificence’’. Ainsi, l’homme tout entier baignait dans la lumière divine. Mais depuis le péché, cette auréole de gloire qui illuminait son esprit a disparu, et il n’est resté à l’homme que le vêtement qui couvre la peau. Les vêtements sacerdotaux jouent un double rôle. D’une part, leur caractère sacré est conféré à l’homme qui incarne en sa personne l’idéal de sainteté ; et d’autre part, ils ont pour effet d’éloigner le péché par le rayonnement de l’esprit de sainteté.
De nos jours, l’homme juif revêtu de son châle de prière, tente à travers le rappel des mtzvoth, au moyen des tsitsioth attachés au vêtement, de retrouver la pureté primitive de Adam ha Richone. Couronné des tefiline de la tête, symbole de la pensée, lié par les tefiline de la main, symbole de l’action ; et entouré des mezouzoth aux portes de sa demeure ; l’homme affermit ses pas dans un monde jalonné de mitzvoth.
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